Beyond the horizon
Commissaire - Ian Warrell
auprès de la Fondazione Querini Stampalia
«Ce qui peut sembler d'abord un espace vide au premier, est en fait étrangement accueillant et invite l'observateur à l'habiter. Davide ne représente pas Venise comme une ville éteinte ou morte. Au contraire, sur ses toiles on retrouve la Venise de notre imaginaire. Une ville enchantée, que l'on aperçoit encore de temps en temps... Un espace idéalisé, personnel, qui dépasse la réalité du présent et résonne en nous, dans l'esprit et dans le cœur». Ce sont les mots de Ian Warrell, commissaire de l'exposition Beyond the Horizon dans le cadre évocateur de l'Espace Scarpa de la Fondation Querini Stampalia.
L'exposition présente une quinzaine d'œuvres que Davide Battistin a créées pour l'occasion. Des huiles sur toile de grand format qui racontent une Venise enchantée et onirique chère aux Vénitiens. Il y a Beyond the Horizon, le tableau qui donne son titre à l'exposition, mais aussi Stillness, Canal Grande, Redentore, noms évocateurs qui renvoient à l'imaginaire collectif de cette ville suspendue entre eau et ciel et à la grande tradition des paysagistes, depuis Canaletto à Marieschi, de Bellotto à Guardi, à Turner.
« L'idée d'habiter une œuvre peut être utilisée comme métaphore pour exprimer le rapport que Davide Battistin entretient avec ses peintures consacrées à Venise. En effet, dans les Venises, il y a autant d'occasions de le recréer en peinture et autant de scénarios propices à la réalisation de la peinture de paysage personnelle de l'artiste. En réalité c'est comme s'il y avait deux peintres en lui : le narratif et le contemplatif. La première s'inscrit parfaitement dans la tradition figurative qui fait de la ville flottante une icône universelle ; la seconde est plutôt ce que Venise "devient", en ppratiquant une sorte d'immersion totale... où elle semble se perdre dans une dimension bleue. Davide se laisse envahir par l'atmosphère de sa ville, qui est couleur pur ; disons aussi que le langage visuel qui exprime cette dimension n'est que couleur, les formes n'existent plus, c'est la transfiguration ».
Ainsi Ivo Prandin décrit le travail de Battistin dans l'essai du catalogue qui poursuit : « On observe de près son action sur la toile et on découvre qu'il a éliminé toute trace de pinceau... comme s'il voulait « oublier » la touche qui sert à tisser les images ; le ductus de Battistin est dépassé et la couleur se fond dans une totalité qui appartient plus au rêve qu'au monde vivant... chez Davide Battistin on trouve plutôt que c'est la peinture qui l'attire en lui, dans son propre corps, pour le séduire» .
Si peindre c'est construire avec la lumière, et l'art c'est traduire la matière en image, dans le cas de Battistin on peut parler d'abandon au charme, à ce procédé de chimie fantastique qu'est la création de figurations aux limites de la matière, presque une évaporation ou désincarnation, comme dans sa Venise non plus explicitement dite mais suggérée, rêvée peut-être, si le rêve est un «lieu de passage pour une redécouverte... il est le récit poétique d'une expérience des sens excitée à la mort, pure émotion».